Cachemire

Sunday, 09 January 2022
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Écrit par
Grégory Soutadé

Groupe Cachemire

Il y a des fois dans la vie où, par un jugement trop hâtif, incomplet ou simplement par manque d'information, l'on passe à côté de certaines choses ou de certaines personnes. C'est aussi le charme des rencontres éphémères, qui laissent parfois un arrière goût de regret. Et puis, de temps en temps, la vie vous offre une seconde chance. Ce fut le cas en ce qui concerne la découverte de Cachemire (des "potes" de ce super groupe Manceau qu'est Outrage). Ma première impression les concernant fut très moyenne. Pourtant, lors de la promotion d'un prochain festival, il n'aura fallu qu'un petit extrait de 20 secondes (Moi être roi) pour prendre une grosse claque ! J'ai alors tendu avec joie la seconde joue avec l'écoute de la reprise de Alors on danse. Direction la section boutique sans même avoir entendu le reste de l'album. Dix jours plus tard, un nouveau CD (qui achète encore des CD en l'an 2000 ... 22 ???) venait s'ajouter à la longue série de pensionnaires déjà présents, avec en prime une photo dédicacée !

Commençons par le début. Cachemire c'est avant tout quatre garçons (Fred, Sven, Seb et Farid) qui ont décidés de faire du rock, du vrai ! Le nom, bien que trop générique à mon goût (ce qui rend le référencement parfois difficile), provient du titre Kashmir (ici francisé) de Led Zeppelin. Le groupe se forme sur Rennes en 2012 et sort un premier EP de 4 titres Blonde Box. Deux ans plus tard, en 2014, Photochope-moi est la version "finale" du cet Extended Play. On parle ici d'un rock relativement trivial, qui reprend les influences des quatre garçons. Le tout manque clairement de caractère.

Quatre ans plus tard le quatuor revient sur le devant de la scène avec Qui est la punk ?, une véritable petite bombe. Les p'tits gars ont prit de l'épaisseur. Le son est propre, profond, percutant. Ils nous gâtent d'un équilibre entre compositions originales et riffs plus classiques dans le milieu du rock, ici habillés par Cachemire en mode "gros son". Les textes sont acérés, frontaux ou légèrement décalés. Le tout chanté en Français s'il vous plaît ! Fred (auteur et interprète) est énervé et il le fait savoir. Il a d'ailleurs dû prendre des actions chez Marlboro afin de nous offrir une voix délicieusement rauque, tout en étant capable de monter haut dans les aigus et ce, de manière totalement maîtrisée. Ce dernier s'occupe en plus de tous les aspects esthétiques du groupe. Une esthétique clairement léchée à base de N&B / orange que l'on retrouve aussi bien sur les diverses photos promotionnelles, le livret que dans les clips (ses études dans le design n'y sont pas étrangères).

Qui est la punk ? (2018)

Pochette de l'album "Qui est la punk ?"

Qui est la punk ? commence "gentiment" avec La veste. Satire politique un brin décalée mais au combien d'actualité ! Le clip intègre de bonnes idées, mais est déconseillé pour les personnes épileptiques... Il n'en fallait pas moins pour introduire un des gros morceaux de l'album Moi être roi, qui passera sûrement en boucle pendant un certain temps. Il s'agit d'un bel hymne à notre cher président (les présidents changent, pas les mentalités...). On poursuite avec Sexy Beat qui a un léger goût des années 90'. Qui est la punk ? est le deuxième coup d'éclat de cette galette. Il met en avant la vie de Pierrette (égérie de l'album), ancienne déportée dont l'existence est à la fois proche et tellement éloignée de la notre. Tandis que Come on baby hérite des influences pop/rock anglaise du groupe. Dans le genre complètement décalé, on a droit à un surprenant Éric Cantona. Après une "petite" critique ecclésiastique, Joue avec nous envoie du lourd. Vient alors It's only you, clin d’œil au rock des années 80. Tic tac étant le seul titre un peu calme et mélancolique (parce qu'il en faut aussi dans le rock), réflexion sur le temps qui passe. Pour finir sur une excellente note, M. Ducontoir avec ses éléments clairement métal ainsi que quelques touches électro vient parfaire un superbe opus.

Dernier Essai (2022)

Pochette de Dernier Essai

Février 2022, Cachemire sort son nouvel album Dernier Essai. Hasard ou non, le tournoi des 6 nations 2022 s'achève sur un grand chelem du XV de France, ce qui n'était plus arrivé depuis 12 ans ! Personnellement, je n'aurais pas eu à attendre les 4 années qui nous séparent du précédent opus.

Si on devait résumer, il s'agit d'un album en deux parties. La première est plus proche de Qui est la punk ?, tandis que la seconde est plus dans l'esprit de Photoshope moi. Autant dire que tout le monde n'y trouvera pas forcément son compte (ce qui est d'ailleurs mon cas !), ou inversement... Commençons par ce qui fait mal : Pour l'enregistrement et le mixage, le groupe a choisi de faire confiance aux même personnes que précédemment (notamment Charles De Schutter au Rec'nroll studio), ce qui est une bonne chose. Malheureusement (le succès aidant ?), la distribution est assurée par Sony Music France et (conséquence ou non ?), quelqu'un d'autre a pris en charge le mastering. Résultat, on se retrouve avec des basses gonflées à bloc, des aigus ultra compressés, le tout venant surcharger la bande des médiums produisant une bouillie assez infâme à l'écoute... Autre grosse déception, la superbe reprise de Alors On Danse pointe aux abonnés absents. Choix artistique ou technique/financier (pas facile de toucher au demi-dieu Stromae) ? Cela restera dans les petits papiers du groupe. Toujours est-il que Fred semble avoir arrêté la cigarette (...), ce qui est fort dommage (pour nous en tout cas).

L'album commence pourtant très bien avec un énergique Criez dont le clip avait été dévoilé quelques semaines plus tôt. On enchaîne avec un superbe Je, critique de cet homo sapiens qui se prend pour le roi du monde. Influenceur, parodie du système d'influence des réseaux sociaux correspond au nouveau chemin emprunté par Cachemire avec un rythme rapide, teinté de sonorités pop ainsi que des montées plus fréquentes dans les aigus durant le refreain. Rester mort est sans doute le meilleur morceau de l'album : à la fois mélodique, agressif et puissant, une très belle réussite ! Rouge, fruit de la collaboration avec Kemar de No One Is Innocent, commence très fort et aurait pu être excellent s'il ne se vautrait pas lors du refrain chanté. Le reste de l'album, malgré quelques bonnes intentions (comme sur Les Petit Poings en partie chanté par Niko Jones de Tagada Jones ou encore Dernier Essai), ne correspond pas mes "standards" et est très difficilement écoutable tant au niveau de la composition que du mastering.

On sent que le groupe prend de l'envergure, poussé par une scène rock française renaissante, après des années de relégation. Avec ce nouveau statut vient également le choix des collaborateurs et des contraintes plus importantes. Ce genre de mutation n'est jamais facile à gérer et, là où beaucoup de groupes se sont perdus en chemin, espérons que Cachemire fera les bons choix !

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