Dorloteur d'abeilles

Sunday, 18 August 2024
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Écrit par
Grégory Soutadé

Selon les chiffres officiels, chaque Français consommerait environ 1,5kg de miel par an. Soit un consommation globale de 45 000 tonnes, dont 90% seraient importés. Difficile d'y voir clair tant il y a de producteurs qui vendent/donnent en direct. Difficile également de faire la part entre le miel consommé directement ou intégré dans d'autres produits, notamment le fameux pain d'épice. En effet, d'un point de vue personnel, la consommation brute semble relativement faible, notamment du fait de la concurrence d'autres produits plus attractifs : chocolat, sucre, sirop d'agave (ou équivalent)...

Quoi qu'il en soit, le rendement par ruche a été divisé par 2 en dix ans. Entre réchauffement climatique (l'année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée et 2024 s'apprête à la surpasser), pesticides, artificialisation des sols (les abeilles ne butinent ni le béton, ni le gazon), maladies et parasites (favorisés par des températures chaudes), nouveaux prédateurs (bonjour le frelon asiatique)... Les abeilles ont la vie dure. Pourtant, l'on sait parfaitement le rôle essentiel joué par les pollinisateurs dans les écosystèmes : sans eux, beaucoup de plantes (dont celles que l'on mange) ne se reproduisent pas, donc pas de fruits, ni de légumes à la clé.

Je parle bien ici de pollinisateurs, car il n'y a pas que les abeilles qui font ce travail, mais également tout un tas d'autres insectes (même le frelon asiatique !). Si on se concentre uniquement sur les abeilles, toutes ne produisent pas de miel. En effet, il existe environ 20 000 espèces différentes ! Notamment les osmies rousses (osmia rufa) et les osmies cornues (osmia cornuta). Ces deux dernières sont des abeilles dites "solitaires", c'est à dire qu'elles ne vivent pas dans une ruche avec leurs congénères. Elles vont utiliser des petites cavités (notamment dans les troncs d'arbres) afin d'y déposer du pollen. Une fois qu'il y a suffisamment de stock, elles vont pondre un œuf et refermer la cavité avec de la terre qu'elles auront humidifié et qui va sécher. Elles pourront faire plusieurs cavités à la suite. C'est un travail qui dure environ un mois avant qu'elles ne meurent. De leur côté, les œufs vont éclore en petits vers qui vont manger le pollen. Ils vont ensuite se transformer en cocons pour passer l'hiver. Une fois le printemps venu (ils ressentent le changement de température), les cocons vont éclore pour donner naissance aux abeilles et recommencer ainsi le cycle.

Les osmies ne sont absolument pas agressives. Elles se contentent de butiner et de se reproduire, ce qui permet de les observer tranquillement. C'est pour toutes ces caractéristiques qu'a été lancée l'initiative "Les Dorloteurs d'Abeille". Le principe consiste à vendre des habitats (plusieurs formes et tailles sont disponibles) pour les osmies (avec ou sans cocons). Le particulier enverra l'année suivante sa "récolte" de cocons afin qu'ils passent l'hiver à l’abri et puissent être en parti re distribués. Il y a un achat récurrent de tubes en carton qui simulent l'habitat naturel des abeilles (elles se reproduisent à proximité de leur lieu de naissance). Les osmies ne sont pas une espèce particulièrement menacées, mais il s'agit d'un outil pédagogique très intéressant (en plus d'avoir une vraie utilité), surtout pour les jeunes générations qui peuvent facilement observer tout le cycle de vie, notamment avec certains tubes transparents et un toit amovible afin de ne pas trop les déranger.

Attention cependant. Comme mentionné plus haut, il ne suffit pas d'élever des abeilles dans une ruche/dorlotoir pour que la vie reprenne. Comme tous les êtres vivants, les abeilles ont besoin de se nourrir. Or, la nourriture se raréfie : hors des villes, l'agriculture prend le pas sur les espaces sauvages. Dans les villes, c'est le béton qui domine et, lorsqu'il y a un jardin, il est souvent taillé ras, avec peu de diversité en terme de fleurs. C'est pourquoi il est important, d'une part, de planter des fleurs mellifères et, d'autre part, de laisser des espaces sauvages non taillées qui seront des habitats à insectes et d'où va naturellement pousser (sans engrais, ni arrosage) des petites fleurs utiles pour la biodiversité. En parallèle, l'idéal est de mettre à disposition des points d'eau (peu profond et avec des cailloux) afin qu'elles puissent s'abreuver après une longue journée de travail. Il n'est d'ailleurs pas nécessaire de posséder un dorloteur pour mettre en pratique ces conseils !

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