Halte aux squatteurs !

Sunday, 08 December 2024
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Écrit par
Grégory Soutadé

Trouver un nom est toujours un exercice délicat, car il aura toujours une portée et une connotation sur un temps plus ou moins long. Une fois les choses actées, en changer pourra jeter le trouble chez les personnes qui auront connues l'ancienne référence.

Mon dernier projet en date est Drycat. Le nom retenu n'a été choisi que récemment. Toute sa version de développement s'est faite sous l'acronyme ssss, qui reflète plus la nature du projet mais est moins facile à retenir pour l'utilisateur. Une fois ce joli nom évoquant nos chères bestioles choisi, il aurait été bon de faire une recherche pour savoir s'il n'était pas déjà attribué. J'ai oublié de faire la démarche. Résultat, le projet est un homonyme d'un aspirateur industriel... Les deux mondes restent toutefois suffisamment éloignés pour éviter les confusions et que l'utilisateur puisse retomber rapidement sur ses pattes.

Le projet est désormais exposé aux yeux du monde entier via l'adresse https://drycat.net. Comme pour toutes les adresses internet, elle doit être enregistrée chez un organisme certifié appelé "registrar" (bureau d'enregistrement). Cet enregistrement n'est pas gratuit. Il faut s'acquitter d'une cotisation annuelle plus ou moins importante selon les organismes et l'extension choisie (.fr, .com, .net, ...).

Mon idée première était d'enregistrer l'adresse drycat.com. Le premier réflex est de tester directement cette adresse dans un navigateur. On arrive alors sur une page indiquant que le nom de domaine est à vendre. Bonne nouvelle puisque je souhaite l'acquérir. Ce service est proposé par l'Américain GoDaddy. Là où les choses deviennent étranges, c'est qu'il y a un encart qui propose de faire une offre pour le nom de domaine ("Make an offer") et n'est donc pas soumis à une grille tarifaire. Je tente de rentrer 10$, ce qui semble cohérent (en France, un nom de domaine en .com coûte dans les ~15€/an). Un message en rouge apparaît indicant que le propriétaire n'accepte pas d'offre en dessous de 5 000$ ! En gros, il y a un co***** qui a enregistré ce nom de domaine dans le seul but de le revendre.

Ce phénomène de squat n'est pas nouveau. Sauf que jusqu'à présent il était utilisé pour 2 raisons principales :

  • Faire payer de grosses entreprises
  • Créer un site de phishing

Le premier point n'excuse pas le squat. Les entreprises peuvent d'ailleurs porter l'affaire en justice lorsque la marque a été enregistrée préalablement au nom de domaine. À l'inverse, certaines entreprises ont tenté de s'approprier des noms déjà réservés par des personnes légitimes. Le deuxième point ne l'excuse pas non plus et peut être particulièrement vicieux avec des nom comme faceboook.com ou facebook.co. D'autant plus que depuis 2012, le nombre d'extensions a considérablement été élargi, passant de 21 + 250 extensions régionales à plus de 1 000 ! Avec des extensions plus ou moins farfelues telle que .builders, .buzz, .christmas, .guru, .kim, .ninja, .rich ...

Je pense que cette ouverture a poussé à la création d'un marché dit "secondaire". Il y a même une section dédiée sur le site de GoDaddy. Il devient donc de plus en plus cher pour une entreprise (internationale) de couvrir toutes les possibilités acceptables. Dans ce nouveau marché secondaire, les noms de domaines les plus prisés sont ceux avec une extension courte (et générique), souvent associée à un pays.

Transformer cette mécanique légitime en actif numérique spéculatif est une pratique infecte. Même si le spéculateur arrive, de temps en temps, à écouler un de ses squats, les entités qui gagnent vraiment de l'argent sont les registrars. Comme dans une guerre, les personnes qui s'enrichissent sont celles qui vendent des armes...

Personnellement, je possède plusieurs noms de domaine. Mon registrar favoris était Gandi, mais ils ont, semble-t-il, décidé de se saborder complètement avec d'une part, une diminution des services associés au nom de domaine (adieu le mail) et, d'autre part, une augmentation significative des tarifs. Ainsi, s'enregistrer chez eux (hors .fr) coûte 2 à 3 fois plus cher qu'ailleurs, ce qui est complètement injustifié !

J'ai donc migré tous mes actifs (hors soutade.fr) vers OVH. Le tarif y est correct, l'interface de gestion très moche et les fonctionnalités plus restreintes. Typiquement, on n'a pas une totale liberté quant aux entrées DNS. Particulièrement pour créer les entrées DNS inverse (PTR), qui ne sont disponibles que quand on loue un serveur... Résultat, j'ai dû monter mon propre serveur DNS pour Drycat afin de ne pas être filtré par les clients mails (notamment gmail qui impose une entrée PTR). Le problème est qu'un serveur DNS non officiel peut être considéré comme n'étant pas de confiance par beaucoup d'acteurs... Bref, tout le monde essaie de trouver des sous de tous les côtés.

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