Il y a 6 mois, je me faisais une grave entorse de la cheville lors d'un entraînement : rupture du ligament talo-fibulaire et rupture partielle du ligament calcanéo-fibulaire. Cela signifiait arrêt total suivi d'une ré éducation, donc j'allais perdre en cardio et en masse musculaire. Malgré certaines séquelles qui resteront à vie, j'ai pris cet événement avec philosophie. Je trouvais que perdre un petit peu d'intensité et devoir travailler de nouveau pour revenir au même niveau était un challenge intéressant.
Vendredi dernier, sortie prévue de 10km à allure intense. C'est la première fois depuis 6 mois que je passe la barre des 12km/h de moyenne sur cette distance, ce qui fait que je me rapproche de mon niveau pré accident. Pour arriver à ce résultat, j'ai dû cravacher pendant toute la sortie, être entre 90% et 100% de mes capacités durant 9km et à plus de 100% dans le dernier kilomètre, j'ai dû forcer ma respiration au maximum pendant 50 minutes afin d'oxygéner les muscles. J'ai dû m'encourager mentalement pour ne rien lâcher jusqu'à la fin en essayant de tenir à chaque fois au moins 1km de plus. Le tout en restant concentré sur le parcours afin d'éviter les diverses racines et cailloux. Le parcours étant plat, je savais que je n'aurai pas de variations de rythme (qui mettent une pression importante sur le cœur) et donc que je pouvais me permettre d'être à fond jusqu'au bout et non dans la gestion.
À l'arrivée, j'ai mis plus de 10 minutes pour récupérer. Sur le chemin du retour j'avais des fourmis dans les jambes car le cœur avait encore du mal à tout alimenter. Bref, je suis allé au-delà de mes limites et c'est pour ce genre de sortie que j'aime courir, ou plutôt que je suis drogué à la course. Car une fois l'effort terminé, le corps sécrète plus ou moins rapidement des endorphines (hormones de la récompense), ce qui provoque un état de bien être. Mais pour arriver dans cet état, il faut être capable maintenir un effort physique intense pendant une durée suffisamment longue. Parfois ces décharges endorphiniques interviennent pendant l'effort, ce qui est assez magique puisqu'il n'y a plus aucune sensation de douleur ou d'essoufflement pendant 10/20 secondes.
Ce genre de sensation est quelque chose que les gens qui ne font pas ou peu de sport ne peuvent pas comprendre car quand on est débutant, lors d'un effort, on va rapidement passer d'un état de souffrance à un état de douleur et donc stopper rapidement (on arrive trop vite à ses limites). Mais avec de l'entraînement, cette sensation de douleur va être repoussée dans le temps et l'intensité. Il ne reste donc qu'une sorte de "souffrance" qui peut être surpassée par la volonté.
Il faut toutefois avouer que le sport est une activité chronophage et énergivore. Plus de 50% du temps il s'agira de faire du maintien et/ou du renforcement sans forcément entrer dans ces états de "transe". Ce sont également des moments où on aimerait faire autre chose, être ailleurs, mais il faut quand même "bosser".
Un point contre intuitif est le fait que plus on en demande à son corps, plus il nous en donne. Certes, il faut mesurer ces paroles, mais on se met souvent des limites psychologiques en terme de volume de travail. En poussant un peu plus la machine, on remarque que celle-ci répond plutôt bien et même de mieux en mieux avec le temps. Le sport est aussi un révélateur de notre structure corporelle. Si pour une raison ou une autre on a une mauvaise position (lié au travail notamment) ou quelque chose qui n'est pas bien aligné/conçu (alignement du dos, souffle au cœur...), le fait de le faire travailler va faire ressortir des douleurs. Ce n'est pas grave en soit, mais il est important de les soigner, la douleur est un bon indicateur. La douleur est d'ailleurs un facteur qu'il faut savoir maîtriser : savoir l'ignorer à bon escient (le temps que les muscles se chauffent par exemple) et savoir l'écouter quand cela est nécessaire pour éviter de tout casser. Il est donc important de pratiquer dans de bonnes conditions. Malheureusement il n'est pas toujours évident de déceler certains signaux d'alertes quand on est la tête dans le guidon avec un objectif en tête...
D'une manière plus générale, la balance avantages/inconvénients et quand même largement bénéficiaire. Personnellement, ce sont des moments "loin" du monde pendant lesquels je peut évoluer en pleine nature : respirer à pleins poumons, sentir les différentes fleurs, prendre le soleil, être au calme, ne penser à rien d'autre qu'au chemin à parcourir. Moments pendant lesquels je dialogue avec mon corps (savoir en permanence l'état des muscles, le niveau d'effort du cœur, être concentré sur la respiration). Cela permet également de booster le système immunitaire, de générer de la bonne fatigue. Mais aussi avoir la satisfaction de faire toujours mieux (merci les montres GPS qui permettent de suivre sa progression et de se motiver à poursuivre). Et même si la course à pied peut paraître rébarbative en soit (ce qui n'est pas complètement faux), elle permet d'accéder à une meilleure condition physique afin d'être plus à l'aise dans des sports plus ludiques et donc d'y prendre plus de plaisir !